Il s'asseyait à la table avec une Selectric devant lui, les coudes bien sur les côtés, et puis il avait cette espèce de décharge électrique et il se mettait à taper. Une phrase, puis il attendait de nouveau, les bras en dehors, il avait une nouvelle décharge, et il tapait une autre phrase. A l'observer, j'ai commencé à comprendre que ce qu'il essayait de faire, c'était contourner les points de vue pesants, les idées reçues, les clichés, tout ça, pour parvenir à quelque chose davantage lié à son inconscient et à sa perception immédiate des choses. Il voulait en quelque sorte sortir la phrase avant que quoi que ce soit n'interfère avec elle en fait de convention ou de préconception. L'idée de base était que l'histoire fonctionnerait comme une sorte de moteur à combustion interne, avec tout du long un flux constant d'explosions d'intensité plus ou moins égale.