Je voudrais résoudre l’équation, trouver la logique de cet être traversé de mutations, né à Paris, France, en l’année 1974 puis plus tard en 1997 et encore plus tard en 2007, appelé à renaître en corps. Oui, moi la vérité je parle, perdu au milieu de pensées de joie et de désespoir, de calme et de chaos, de paix et de guerre qui convergent en un opéra que je tente de déchiffrer. Paresseux, parasite. Baignant dans le clair-obscur de ce monde ravagé d’inquiétude. Tu ne sais pas la chance que tu as. Ce monde d’impuissance que je traverse à ma façon, dans Paris, entrouvrant la porte du 21ème siècle. Vitesse, mobilité, excès d’émotion, d’énergie, de perceptions. Faiblesse ou force, te voilà : c’est la force. Dans ce manque d’espace. Vas partout. Et cette pure présence mortifiante de la loi. Réponds à tout. Un monde qu’on ne comprend plus tant la raison y est absente. On ne te tuera pas plus que si tu étais un cadavre. Tu n’es pas raisonnable. Oui, la joie succède au découragement. Lucide, explosif, je veux jouer, je ne suis pas encore au bout du vertige, de la fixation. Vivre, s’égarer, tomber, triompher, recréer la vie à partir de la vie. La traversée c’est la force. Voilà ce que je me dis dans la capitale de la cyclothymie et du détournement psychique. Tu proposes quoi à la place ? Combien de suicides pour un qui s’en sort ? Je veux être celui-là, je me fous de sauver le monde du suicide. Partout on brûle, on distille, on raffine. Oui : le grand cri de jouissance. Mouvement… musique… lumière… Un corps traversant tous les lieux, passant d’un lieu à l’autre, sur la suture, avec la force de l’éclair ou du cadavre, la tête étrangement noircie de mots, sachant que nous sommes nombreux à garder la musique intacte, sans assignation d’identité, sans fantôme fabriqué par nos terreurs et nos refoulements, sautant les murs de la haine, les frontières, les barbelés, la racine puante des mondes, la langue, la haine, la chute la tête la première. Multiplier les rôles, changer, bouger, ne jamais être le même. « quel langage pourrais-je vous parler ? »… « Français encore un effort pour être asphyxiés »… « mourir n’est pas finir »… Tu rentreras dans le rang tôt ou tard. Ils ne peuvent traduire ma grâce qu’en désir de me voir tomber mais le monde s’écroule, me traverse et ne me retient pas. Cerné par ces damnés qui ne se révoltent plus, vaincus, étouffés, sous perfusion d’anxiolithiques, de vitamine C, de cellules sur-dosées en caféine pour commencer la journée, de Ritaline pour la concentration au bureau, de Prozac pour voir la vie en couleur, de bétabloquants en cas de trac et, le soir venu, des hypnotiques pour lâcher prise et bien dormir jusqu’au lendemain matin, avec la télévision et ses psychoses bourgeoises à répétition, ses scènes de baises virtuelles filmées comme des meurtres, ses acteurs de carton pâte errant à la recherche d’eux-mêmes, le zoo humain, des mannequins plus vivants que nature derrière des vitrines, des pulsions sauvages re-jouables à merci, des vedettes qui clignent de l’œil d’un air complice… Français avez vous entendu ?… il faut être réaliste tu comprends ? Pourquoi t’obstines-tu ? Et si jamais période historique fut peinte en grisaille, c’est bien celle-ci, hommes et événements comme des schlemihls à rebours, comme des ombres qui ont perdu leur corps.