Paris ne tourne plus rond et s’enfonce sous la terre du réel vers des lieux de plus en plus réduits et incertains obéissant à un spectaculaire resserrement de l’espace. Les lieux s’emboîtent les uns dans les autres obéissant à un tragique mécanisme que plus personne ne désire penser. Le mimétisme marche à fond. Les signes sont devenus interchangeables à force de participer indifféremment aux divers plans d’aménagement du réel. C’est un trou sans fond qui se referme de semaine en semaine, de mois en mois, un renversement des perspectives, une calme neutralisation.
La morosité plane comme un voile noir au-dessus des têtes. L’obscurité envahissante, comme si elle avait toujours été là, cerne notre existence fabuleuse, réduite à une île et dans cette sorte de nébuleuse, on est d’autant plus aliéné qu’on y comprend quelque chose. La roue meurtrière de la vie en société avance inexorablement, au rythme d’incessants dérapages, sans égards ni pitié pour personne et toute faiblesse est synonyme de souffrance et d’humiliation, quelles que soient ses manifestations ou son origine.
Peu à peu, j’essaye de me détacher de ce spectacle lugubre, de ce sordide appareil de mort. Je suis fatigué de la complaisance. Je désire un peu de calme ; risquer à chaque plan la catastrophe, être au cœur de la zone de turbulence, c’est fatigant à force. D’un autre côté, je ne sais pas vraiment ou je vais, je suis dans un dédale de forces cyclothymiques qui tirent la corde des deux cotés. Un spectacle cruel se joue à l’intérieur de mon corps pendant qu’une caméra de surveillance filme les morts et les vivants que je laisse traîner derrière moi. J’entrevois les rouages de ce langage de mort que j’ai intégré en moi comme une vérité durant pas mal d’années et cela me fait peur.
J’en suis au clair-obscur je crois, à l’affranchissement, dans un pli à défroisser pour échapper à mes fantômes. Entre éclairs de lucidité, séquences de guerre hyper-réaliste et paradis. Comment ais-je pu perdre le monde à ce point ? Peu importe, je ne veux pas lâcher prise. Travailler seul à éclairer mes ténèbres, voilà ce que je me dis au milieu du brouhaha connecté et des verres qui s’entrechoquent.