Publication permanente

Regarder partout, émotions inouïes, boule au creux du ventre, sang dans la gorge, avaler toutes les colères du monde, la sérénité ? : celui qui décide de jouer sort ses armes ; désordre des mots, révolutions à venir dont il n’a pas la moindre idée, effacement des contours, l’horreur des gestes réglés, multipliés, du massacre universel, l’entassement quotidien de récits atroces, l’exténuant ressac d’images et de sons et en même temps, par ces additions de fragments, quelque chose se forge à toutes fins utiles. Il ne sait pas encore quoi. Il se souvient d’une règle et d’une aspiration à la règle, et connaît aussi le désordre, avec quelques fois plus d’acuité même que ceux qui n’ont jamais connu que lui. L’homme à la caméra emboîte le pas à la vie. Arrêter le flou, le décadrage, les accidents, la confusion des corps, le passage dans le même plan d’une identité à l’autre, la menace de l’enlisement, brûler l’histoire, poser la caméra, faire un plan fixe sur ses pensées, reprendre son souffle, écrire, dire, entrer dans d’autres résonances, trouver une rythmique, un nouveau silence, se mettre en état de mutation, de métamorphose par rapport au temps de l’échange accéléré et de sa jouissance morbide, trouver d’autres vies, secrètes, révélées, se transmuer dans un autre présent, reprendre les gestes, les poses et les regards, inventer d’autres créatures, d’autres émotions, d’autres fictions, d’autres désirs, qui, là, libérés, constitueraient un bloc de sens fissurant le choc des images.