
Sur les flots joyeux de la mer sombre et bleue, nos pensées sont infinies et nos âmes sont libres; aussi loin que la brise peut se faire sentir, que les vagues écumeuses étendent leur empire : là est notre patrie, là nos royaumes sans limite à leur puissance. Notre pavillon est le sceptre auquel se soumettent tous ceux qui le rencontrent. Dans notre vie sauvage, nous passons avec une joie égale du calme au tumulte, de la peine au repos. Oh! qui peut la décrire cette vie? Ce n'est pas toi, esclave abruti, dont le coeur défaillirait sur la vague bondissante; ce n'est pas toi, seigneur vaniteux, insolent débauché, pour qui le sommeil n'a plus de douceur, pour qui désormais les plaisirs restent sans charmes. Oh! qui peut comprendre - si ce n'est celui dont le coeur en a senti la jouissance, a bondi triomphant sur les vastes mers - le sentiment d'exaltation, les sensations profondes qui font tressaillir l'être errant sur cette voie sans traces? qui pour la lutte elle-même, souhaite l'approche de la lutte et fait ses délices de ce que d'autres appellent le danger? recherche avec ardeur ce que le lâche fuit avec crainte et peut seul, là où le faible tombe en défaillance, sentir, sentir jusqu'au plus profond du coeur, s'éveiller ses espérances, s'augmenter son courage.
Lord Byron_Le corsaire